Pratiques artistiques en zones rurales
Qui rira le dernier ?
A qui profite l’action culturelle ? Existe-t-il une activité promotrice d’esthétique et de valeur dans les zones autres qu’urbaines ? Peut-on penser le développement culturel en dehors d’une approche holistique ? Jusqu’à quel point la crise économique a-t-elle altéré le savoir-penser, le savoir-être des populations rurales essentiellement composées de jeunes garçons et de femmes ; après que les adultes ont opté pour une immigration dont la ville n’est pas demandeuse ? La crise a-t-elle obstrué la place du rêve dans le quotidien des populations rurales ? La confiance en soi culturellement est-elle menacée ?
Ouro Sidy. A 700 km de Dakar, des hommes, septuagénaires, discutent sous un abri de fortune faisant office de gare routière. Les troncs d’arbres prestigieusement polis par leur usage comme siège par les voyageurs attendant un bus qui ne viendra peut-être jamais, témoignent de la grande oisiveté qui règne dans ce gros village qui, pourtant, passe pour être un des plus animés et les plus riches de la zone.
De très jeunes hommes et femmes s’efforcent de se trouver une activité pour meubler leur quotidien. Par leur accoutrement, leur langage et leur attitude, on devine aisément la grosse influence des antennes paraboliques royalement accrochées à presque tous les toits du village. Les maisons, pâles et affreuses copies de construction vues ailleurs, se dressent, sans âmes, sur de grandes surfaces que rien ne justifie. On embellit comme à la télévision. Quelques rares exceptions signalent des signes akan sur des maisons apparemment très anciennes, preuves du lieu d’émigration de leur propriétaire.
A côté de l’abri, une jeune femme souffle, courageusement, sur son sifflet pour proposer ses produits à un petit groupe qui venait de descendre d’une charrette. Bibelots, bols, pots, plats. Tout en plastique. Il y a bien longtemps que les objets faits à partir de la calebasse ont disparu des ustensiles. C’est plus