Bonjour. Je suis Rideau de Théâtre et je suis fière de parler aujourd’hui au nom de toutes mes consœurs qui travaillent peut être en ce moment-même. D’ailleurs, il n’y a pas plus de deux heures, j’étais en pleine prestation pour Les Mains Sales de Jean-Paul Sartre au Théâtre du Nord Ouest à Paris mise en scène de Odile Malet et Geneviève Brunet où je suis actuellement employé. Je ne cherche pas à me vanter mais j’ai reçu des roses des spectateurs à la fin de la pièce ! Je dois avouer, en toute franchise que j’ai réalisé un travail d’exception : un parfait minutage lors des levés et des descentes, une synchronisation idéale avec l’orchestre, une robe rouge de velours agrémentée de courbes et de plis absolument sensuels qui ont du en séduire plus d’un. Il faut dire que j’ai un poste très haut placé dans la hiérarchie du décor. Que dis-je, je ne fais pas partie du décor, non, je suis celle qui met en avant ce décor, je suis son cadre, son piédestal. Sans moi, tous ces accessoires ne seraient que futiles et sans prestance.
Je me rappelle d’une représentation au cours de laquelle Audrey Dana jouait Paradis sur Terre de Tennessee Williams, Théâtre Edouard-VII. Au bout d’une vingtaine de minutes de jeux, la jeune actrice s’est effondrée sur scène prise d’un malaise. C’est là que j’interviens avec tout mon sang-froid et ma bravoure : je me suis fermée et j’ai ainsi improvisé une sorte d’entracte. Cela m’a valu une promotion au Théâtre de la Madeleine où mon image a été ternie par un évènement qui m’a fait chuter dans l’estime des metteurs en scène. Voilà ce qu’il c’est passé. Un soir, une salle remplie, une pièce du Grand Molière… Les trois coups retentissent. Le silence se fait dans la salle. Les lumières se tamisent et c’est à moi de rentrer en scène, mais je ne le peux ! Un de mes rouages d’ascension était bloqué par un pli de ma robe ! J’insiste, je force sur mon drapé jusqu’à se que celui-ci se déchire… Je me suis retrouvé ridiculisé devant 1450 spectateurs et