Pendant ce temps-là, Santu arrivait à la sortie Nord-Ouest du cimetière, qui débouchait sur la place du village où la fête tant souhaitée allait se dérouler. Tout le village de Poggio attendait avec impatience que les façades des maisons soient illuminées par les couleurs éclatantes des spots électriques. Un an, un an déjà que Santu n’avait pas dansé toute la soirée avec ses cousins, une année qu’il n’avait pas passé la nuit sur la piste de danse à s’amuser, et c’était demain que le volume de la musique serait à son maximum. C’était la fête de l’année et tout le village serait sur son trente-et-un. Santu s’appuya contre le grillage rouillé, essoufflé par ses slaloms entre les tombes. Le petit farceur préparait déjà sa prochaine blague pour effrayer ses amis. L’endroit était parfait ! Un cimetière : le lieu de la peur par excellence ! Il faisait sombre et le chant des grillons accompagnait sa route. Santu se mit à courir pour trouver une plaque mortuaire derrière laquelle se cacher afin de faire peur à ses quatre cousins. Il en repéra enfin une ; il put voir de loin qu’elle était assez large et, malgré la pénombre, il constata qu’elle était taillée dans du granit rouge. Il ne put apercevoir le nom du défunt, à cause de la distance, mais aucun membre de sa famille n’était enterré dans cette partie-là du cimetière. Tout d’un coup notre plaisantin se mit à courir aussi vite qu’il le put mais, trop impatient d’effrayer ses amis, il tomba, s’étalant dans la terre humide. Santu, tout couvert de boue, tenta de se redresser. Alors qu’il se levait, une voix se fit entendre qui l’interrompit dans son geste. À l’intérieur de sa tête, cette voix étrange lui répétait les mêmes paroles angoissantes à la façon d’un disque rayé : « Toi et ta misérable famille, vous payerez pour vos crimes, vous les Leandri, pour vos crimes, soyez maudits, soyez maudits… ». Le garçon secoua la tête, se boucha les oreilles, comme pour chasser des événements auxquels il ne voulait pas croire. Mais