Lettre I

A Salam Alaikoum frère Rachid,

Tout d’abord je voudrais m’excuser de t’écrire aussi tardivement, mais je suis confronté à tellement de événements ces derniers jours dans ce pays, que j’en perds la notion du temps. Cependant, ne t’inquiète pas mon ami, car je ne t’oublie pas. Comme je te l’avais promis au travers de mes lettres, je te ferai part de toutes mes observations et réflexions que j’effectuerai tout au long de mon voyage en Suisse. Dans cette première lettre, j’aimerais te raconter mon arrivée. Tout d’abord, je dois t’avouer que je ne m’en suis toujours pas remis. Ma première surprise fut à l’aéroport, quand, pour la première fois de ma vie, j’ai passé le contrôle des passeports en moins de dix minutes, sans la nécessité de devancer quiconque ou de devoir glisser cinquante dirhams discrètement entre les mains d’un douanier afin de gagner quelques mètres dans la queue, comme dans notre très cher pays. Ensuite, je me suis rendu à la gare pour prendre mon train. Inutile de demander ta direction dans la gare de Genève, car tout le monde vient d’ailleurs. A l’intérieur du train, j’ai cru m’être trompé de wagon et être monté en première classe, cependant j’étais au bon endroit, la deuxième classe. C’était tellement moderne, les sièges étaient encore plus agréables que ceux à bord de la Royal Air Maroc ; j’étais tellement émerveillé que je n’osais pas m’asseoir de travers. Arrivé à destination, je perdis vite mes repères. Les gens ne parlaient plus le Français, mais utilisaient un langage particulier, une sorte d’allemand détruit par l’érosion lorsqu’il a du traverser les montagnes suisses ; par la suite, j’appris qu’il s’agissait d’un dialecte appelé le suisse-allemand. En fait, cela pourrait correspondre au langage des chleuhs de chez nous. Peux-tu imaginer que l’on puisse changer de langue d’une ville à l’autre dans ce pays ? Il paraîtrait même qu’on y parle l’italien dans le sud. Figure toi qu’il existe en Suisse des tribus, comme chez