Science vs religion
SCOTT ATRAN, In Gods We Trust. The Evolutionary Landscape of Religion, Oxford, Oxford
University Press, 2002 (version française à paraître chez Odile Jacob).
PASCAL BOYER, Et l’homme créa les dieux. Comment expliquer les religions, Paris, Robert
Laffont, 2001.
Depuis que XIXe siècle annonça sa mort avec fracas, Dieu se porte mieux que jamais. Ni le capitalisme (en 1990, on estimait que seul 0.7% de la population américaine était agnostique)1, ni le communisme (à en juger par la vigueur contemporaine de l’Église orthodoxe) n’ont été en mesure d’éteindre la flamme du religieux. Par certains aspects, Dieu peut même être considéré comme l’un des principaux vainqueurs du champ de bataille idéologique du XXe siècle.
Les sciences humaines, une fois leur autonomie conquise, n’ont pas manqué de s’intéresser à cette permanence du religieux. Mais, à quelques exceptions près, les explications, qu’elles soulignent l’importance du religieux dans la constitution de la société ou, inversement, dans l’économie du psychisme individuel, n’ont pas fondamentalement ébranlées les hypothèses des
« pères fondateurs », qu’il s’agisse de Marx, Durkheim ou Freud. Les sciences cognitives sont en passe de modifier cette situation. Le formidable développement de l’imagerie cérébrale, d’une part, a récemment donné naissance à une sous-discipline, parfois nommée « neurothéologie », qui vise à identifier les événements neuronaux associés à la phénoménologie du divin2. D’autre part, les développements conjoints de la psychologie cognitive, de la psychologie du développement et de la psychologie évolutionniste encouragent aujourd’hui un nombre croissant de chercheurs à développer une théorie cognitive de la religion. Les livres de Pascal Boyer et Scott Atran s’inscrivent dans ce courant cognitiviste.
L’histoire n’a pas encore déterminé l’événement fondateur de cette nouvelle science du religieux, mais la fin du XXe siècle a vu fleurir une série de conférences dont le but