Simone de beauvoir sur la condition féminine
Est-il fou ou généreux de croire et d’aimer ? Ces interrogations mettent en question le sens même de la vie, celle de chacun et de tous. L’homme dit sérieux est en fait futile parce qu’il accepte de sa vie des justifications toutes faites ; tandis qu’une femme passionnée et profonde révise à chaque instant les valeurs établies ; elle connaît la constante tension d’une liberté sans appui ; par-là, elle se sent sans cesse en danger : elle peut en un moment tout gagner, ou tout perdre. C’est ce risque assumé dans l’inquiétude qui donne à son histoire les couleurs d’une aventure héroïque. Et l’enjeu est le plus haut qui soit : le sens même de cette existence qui est la part de chacun, sa seule …afficher plus de contenu…
Jamais Stendhal ne se borne à décrire ses héroïnes en fonction de ses héros : il leur donne une destinée propre. Il a tenté une entreprise plus rare et qu’aucun romancier, je crois, ne s’est jamais proposée : il s’est projetée lui-même dans un personnage de femme. Il est remarquable que Stendhal soit à la fois si profondément romanesque et si décidément féministe ; d’ordinaire les féministes sont des esprits rationnels qui adoptent en toutes choses le point de vue de l’universel ; mais c’est au nom du bonheur individuel que Stendhal réclame l’émancipation des femmes. L’amour n’aura, pense-t-il, rien à y perdre ; au contraire, il sera d’autant plus vrai que la femme étant pour l’homme une égale pourra plus complètement le