Sommes-nous condamnés à nous définir librement ?
1.1. Définitions
Définir "définir" paraît paradoxal. Pourtant, tous les dictionnaires sérieux s'y emploient (c'est même à la lecture de cet article qu'on juge la valeur du dictionnaire). Définir consiste à associer à un mot une formule précise indiquant les caractères essentiels du signifié du mot. Le cas échéant, la définition apportera des précisions linguistiques (elle signalera tel mot comme archaïque, tel mot comme relâché) ; mais en principe, elle se distingue de la notice encyclopédique en cela qu'elle ne fournit pas de description du signifié, ni dans ses propriétés, ni dans ses fonctions. La définition idéale compte exactement deux mots : le genre dans lequel la chose signifiée se range, et la spécificité qui permet, au sein de ce genre, de la distinguer de toutes les autres choses rangées dans ce même genre. Ainsi l'humain défini comme "zoôn logôn" : il appartient au genre "animal" (comme le lion, la mouche ou le moineau) ; et au sein de ce genre, il possède pour caractère spécifique (ce qui distingue l'espèce humaine de toutes les autres espèces animales) le discours articulé. L'humain peut également être bien d'autres choses (bon ou mauvais, intelligent ou sot etc.) mais "zoôn logôn" constitue, pour lui, une définition suffisante. Notons que la classification moderne des plantes et des animaux retient exactement cette méthode de définition (ainsi le loup se définit-il comme canis lupus : l'espèce lupine au sein du genre canin). Notons aussi que, contrairement à ce que prétendaient deux copies, il est parfaitement possible de définir un objet changeant (pour preuve : les définitions de "nuage", de "précipité" ou, tout simplement, de "changement").
"Définir librement" semble un oxymore : en toute rigueur, la définition s'appuyant sur les caractères spécifiques de la chose à définir, la réalité de ces caractère la contraint fortement, voire intégralement. Ne pourrait être "défini librement" qu'un objet imaginaire ou en