En février 1848, la révolution parisienne surprenait tout le monde et, avec la fuite rapide du roi Louis-Philippe, laissait bien dépourvus les nouveaux dirigeants improvisés. Quoique portés au pouvoir par l’insurrection, les hommes du Gouvernement provisoire craignaient d’abord la pression armée d’une foule parisienne d’autant plus exigeante qu’elle avait eu facilement raison de la monarchie censitaire. Devant des ouvriers en armes et échauffés, l’éloquence de Lamartine n’avait pas été de trop, pas plus que sa promesse lancée dans la salle Saint-Jean de l’Hôtel de Ville d’instituer le suffrage universel. Celui-ci n’était proposé par aucun programme politique, même si quelques rares républicains en évoquaient l’avènement dans un avenir indéfini. L’urgence l’imposa. Le suffrage universel consacrait l’inévitable abandon du système électoral censitaire car il était devenu impossible de se contenter d’un simple élargissement du cens électoral, comme le réclamait la campagne des Banquets, ce qui serait revenu à exclure les insurgés du corps électoral. Le décret du 5 mars 1848 avait d’abord vocation à ramener le calme. Analyse de l'image
Identifié par son vêtement, un ouvrier abandonne son fusil pour déposer un bulletin de vote. Dans cette scène allégorique, le suffrage universel est symbolisé par une urne antique dont le modèle est assez éloigné des urnes réelles mais qui rattache la procédure aux sources les plus anciennes. L’allégorie présente encore la nouvelle institution comme une conquête populaire qui justifie d’autant plus que l’on dépose les armes. Ce n’était peut-être pas l’objectif de tous les insurgés, ni même de la plupart d’entre eux, mais l’idée s’en imposa. Au-delà de cette sorte d’interprétation immédiate de la révolution de février 1848 proposée par les républicains, l’abandon des armes pour le vote a valeur d’exhortation : la violence révolutionnaire menaçait toujours, de nombreuses armes étaient aux mains de la population parisienne, et le succès