Il était bientôt huit heures. Habillé d’un costume noir accompagné d’un nœud papillon que ma femme avait attaché à mon cou comme la corde d’un pendu qui lentement arrache chaque instant de vie à un condamné, je pressais le pas dans la brume de l’Avenue de la République. Arrivant à cette réception mondaine dont mon titre obligeait ma présence, je me hâtais de saluer les personnalités hypocrites, perfides et importunes avec une courtoisie déguisée afin de pouvoir m’éclipser une fois que j’en aurais l’occasion. Ainsi, j’errais sur la piste de bal n’attendant que le moment propice pour disparaître. Puis, m’échappant un instant sur la terrasse, une brise vint remuer la houle que l’on pouvait distinguer sur mes cheveux ; cela éveilla mon esprit et adoucit le bourdonnement perturbant de cette soirée. Je profitais de ce moment pour me détendre un instant.
Une odeur venait caresser mes narines, réveillant doucement les souvenirs d’une jeunesse éphémère que la mémoire seule parvenait à maintenir intacte. Ce parfum insaisissable et alambiqué vint se heurter avec acerbité contre mon nez. Puis, cette symphonie d’odeurs discontinues que possèdent les fragrances somptueuses balançait ce déferlement d’émotions comme des vagues venant s’écraser sur un rocher. Des notes aiguës, pointues venaient tâter mes narines de manière éthérée et fugace laissant place à des croches plus longues et onctueuses pénétrant ardemment mon esprit. Cette émanation terminait ce morceau avec un ton ambrosiaque et suave. S’effaçant peu à peu, cette essence fomentait et animait dans mon cœur une fièvre, une passion… Oui, Elle était là… Jamais je n’avais perçu de parfum si insolite et singulier depuis sa rencontre. Je me précipitai à l’intérieur essayant de suivre ce qu’il restait de ce parfum enveloppant. Me faufilant à travers la foule, bousculant malencontreusement des personnes dont la condition ne faisait point de doute, je m’avançai dans la salle de bal pour la voir au bras d’un jeune homme.
Certes,