Thèse de norbert elias
1. Un résumé de l’œuvre « La Civilisation des mœurs », SH, Hors série n°42, sept-oct-nov 2003 Norbert Elias, 1939, trad. fr. 1973, rééd. Calmann-Lévy, coll. « Liberté de l'esprit », 1991. Xavier Molénat Tout comme son auteur Norbert Elias (1897-1990), La Civilisation des moeurs n'aura eu de reconnaissance que très tardive. Premier tome d'un ouvrage en deux parties, La Civilisation des moeurs paraît en Suisse en 1939 et passe totalement inaperçu. Il faudra attendre sa réédition en 1969 (et que Elias ait depuis longtemps, à 70 ans passés, terminé sa cahotante carrière académique !) pour que la communauté scientifique saisisse l'importance de cet ouvrage inclassable. Cracher, se moucher, déféquer... La civilisation à laquelle s'intéresse Elias n'est pas un fait, ou une entité (comme lorsqu'on parle de « civilisation occidentale »), mais un processus. Le point de départ de sa démarche est un constat historique : à partir de la Renaissance, les « moeurs », c'est-à-dire les manières de se tenir à table, de se moucher, de déféquer, la sexualité..., évoluent très rapidement vers un refoulement de leur aspect « animal » ou « pulsionnel ». L'étude d'« ouvrages de civilité » qui constituaient, à la Renaissance, des sortes de manuels de savoir-vivre à l'usage de la classe dominante - montre, par exemple, que le crachat, auparavant considéré comme une pratique saine, est désormais perçu comme inconvenant et dangereux car il favorise les contagions. Le rapport à la nourriture, lui, se fait plus distant avec l'invention de la fourchette, qui remplace les doigts. La nudité recule, et la sexualité acquiert une dimension taboue : on ne doit pas en parler devant des enfants. Cette évolution des pratiques s'accompagne d'une évolution de la sensibilité, comme le montrent les sentiments de honte ou de dégoût que nous éprouvons désormais face à des pratiques « non-civilisés » qui, au Moyen