Travail sur le livre métaphysique des tubes d’amélie nothomb
1.2.1 Mise au point théorique: la mélancolie, un deuil maternel impossible
1.2.1.1 Différenciation et position schizo-paranoïde
Comme je l'indiquais précédemment, avant d'amorcer mon étude de Métaphysique des tubes, je me propose d'expliciter les circonstances entourant l'installation d'une pathologie mélancolique chez l'individu. Ce préambule théorique, qui se veut aussi intelligible que possible, m'apparalt nécessaire à la compréhension de la mélancolie et primordial pour la suite de mon analyse. D'après Didier Anzieu et ses collaborateurs, l'enfant assimile progressivement, lors du contact corporel avec sa mère, ce que le psychanalyste appelle une peau ou une enveloppe psychique, qui serait une sorte de tissu cutané permettant les échanges avec l'extérieur7• Si la mère est suffisamment bonne, selon l'expression du pédopsychiatre et psychanalyste Donald Winl1icott, c'est-à-dire si elle répond aux besoins de l'enfant tout en tenant compte de son autonomie grandissante, la peau psychique assimilée par le nourrisson remplira cinq fonctions: « la fonction de contenance; de pare-excitation; de délimitation entre monde psychique interne et monde perceptif; de double connexion entre le monde interne et le monde externe; ainsi que de différenciation de la surface du SelfS ». En d'autres termes, ce que l'enfant acquiert, dans le cadre d'une relation sécurisante d'attachement avec la mère, c'est la conscience d'une différenciation entre leurs deux psychismes, une limite stable entre intérieur et extérieur du corps, et l'aptitude à réguler les échanges avec son environnement.
En côtoyant sa mère, l'enfant intègre également ses premiers objets internes, nous dit Mélanie Klein. Lors de la position schizo-paranoïde, qui a lieu au début de la première année de vie, l'enfant perçoit des objets partiels, de sorte que le sein qu'il tète représente pour lui la mère sur le modèle de la métonymie. Si le nourrisson assimile certains objets partiels