Vie intérieure et souffrance chrétienne
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Vie intérieure et souffrance chrétienne dans les romans de Julien Green
PAR MICHAEL O’DWYER NATIONAL UNIVERSITY OF IRELAND, MAYNOOTH
ans son Discours à l’Académie de Belgique, prononcé le 8 septembre 19511, Julien Green fait des commentaires intéressants sur l’œuvre de Henri Davignon (1879-1964) et celui de l’écrivain suisse, Robert de Traz (1884-1951). En effet, les commentaires de Green sont aussi révélateurs de son œuvre à lui qu’ils le sont sur celui de Davignon et de Traz. Il est attiré par l’œuvre de Davignon parce que c’est un auteur « pour qui le monde intérieur existe2 » et qui traite du mystère de la souffrance chrétienne dans son ouvrage, Un pénitent de Furnes. Chez de Traz, il admire La Puritaine et l’amour, roman dont la protagoniste est une protestante genevoise scrupuleuse qui a une horreur instinctive du péché. Le thème principal du roman est la lutte d’une âme avec sa conscience. Dans ce roman, on retrouve les éléments-clés de l’univers greenien. Notre propos est de faire un parcours de l’évolution du monde romanesque de Green en mettant l’accent sur les deux thèmes qui l’attirent chez Davignon et de Traz, la vie intérieure et le mystère de la souffrance chrétienne, et qui constituent aussi deux thèmes majeurs du monde romanesque greenien. On peut distinguer quatre étapes dans l’évolution de l’univers romanesque greenien.
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Voir Julien Green, Œuvres complètes, Bibliothèque de la Pléiade, III, Paris, Gallimard, 1973, p. 1474-482. 2 Ibid., p. 1474-475.
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La première étape (1926-1929) consiste en trois romans que les critiques appellent « la trinité sombre ». Il s’agit de Mont-Cinère3, Adrienne Mesurat 4 et Léviathan5. Ce sont des romans psychologiques où Green fait une analyse des rapports familiaux dans une ambiance carcérale. Les personnages sont prisonniers de leurs obsessions, ils sont marqués par des tendances violentes et ils cherchent une