Villiers de l'isla adam
Contes cruels
L'affichage céleste
À Monsieur Henry Ghys.
Eritis sicut dii.
(Ancien Testament.)
Chose étrange et capable d'éveiller le sourire chez un financier: il s'agit du Ciel! Mais entendons-nous: du ciel considéré au point de vue industriel et sérieux.
Certains événements historiques, aujourd'hui scientifiquement avérés et expliqués, (ou tout comme), par exemple le Labarum de Constantin, les croix répercutées sur les nuages par des plaines de neige, les phénomènes de réfraction du mont Brocken et certains effets de mirage dans les contrées boréales, ayant singulièrement intrigué et, pour ainsi dire, piqué au jeu un savant ingénieur méridional, M. Grave, celui-ci conçut, il y a quelques années, le projet lumineux d'utiliser les vastes étendues de la nuit, et d'élever, en un mot, le ciel à la hauteur de l'époque.
À quoi bon, en effet, ces voûtes azurées qui ne servent à rien, qu'à défrayer les imaginations maladives des derniers songe-creux? Ne serait-ce pas acquérir de légitimes droits à la reconnaissance publique, et, disons-le (pourquoi pas?), à l'admiration de la Postérité, que de convertir ces espaces stériles en spectacles réellement et fructueusement instructifs, que de faire valoir ces landes immenses et de rendre, finalement, d'un bon rapport, ces Solognes indéfinies et transparentes?
Il ne s'agit pas ici de faire du sentiment. Les affaires sont les affaires. Il est à propos d'appeler le concours, et, au besoin, l'énergie des gens sérieux sur la valeur et les résultats pécuniaires de la découverte inespérée dont nous parlons.
De prime abord, le fond même de la chose paraît confiner à l'Impossible et presque à l'Insanité. Défricher l'azur, coter l'astre, exploiter les deux crépuscules, organiser le soir, mettre à profit le firmament jusqu'à ce jour improductif, quel rêve! quelle application épineuse, hérissée de difficultés! Mais, fort de l'esprit de progrès, de quels problèmes l'Homme ne parviendrait-il