Voltaire
Né à Paris en février 1694, François-Marie Arouet, qui prit à vingt-quatre ans le nom de Voltaire, fut dès l'adolescence l'enfant prodige. Jamais les jésuites qui enseignaient au collège Louis-le-Grand n'eurent un élève plus brillant, ni qui fit espérer davantage : ses maîtres s'accordaient à promettre au jeune Arouet la plus éclatante fortune littéraire. C'était à lui aussi que Ninon, mourant, avait légué sa bibliothèque.
Voltaire avait vingt et un ans et demi quand mourut le grand roi en 1715. C'est ici qu'il faut s'arrêter un instant si l'on veut bien comprendre cette destinée.
Les trente dernières années du règne de Louis XIV avaient été remplies par l'influence de Mme de Maintenon. On peut résumer en deux mots cette période de notre histoire : jamais il n'y eut en France plus d'orthodoxie apparente et moins de véritable religion. Les querelles du quiétisme et de la bulle Unigenitus, les luttes des jésuites et des jansénistes se prolongeant bien après la destruction de Port-Royal, occupaient les docteurs, la cour, l'opinion aussi bien que le clergé ; elles se partageaient la politique avec les embarras financiers touchant de si près à la banqueroute et les soucis de la guerre de la Succession d'Espagne marquée pour nous par tant de revers. Depuis la révocation de l'édit de Nantes, l'Eglise catholique semblait triomphante l'hérésie avait été vaincue, déracinée, les protestants contraints à la fuite ou à l'abjuration. Et pourtant rien de plus trompeur que ce triomphe. Ce qui régnait depuis plus de vingt années à la cour, à Paris, en France, ce n'était pas la foi, c'était