L’anticipation des risques dans les pactes d’actionnaires
Prolégomènes
Si les investisseurs institutionnels sont rarement des aèdes de la grande tragédie grecque, ils appliquent consciencieusement la formule de Sophocle : « Plus faibles sont les risques, meilleure est l'entreprise » . Leur aversion du risque n’ayant pas trouvée d’exutoire dans les garanties légales, c’est sur le terrain contractuel que, praticiens, investisseurs et « désinvestisseurs » s’affrontent. Il est vrai que le mécanisme de l’assurance reste assez peu utilisé : il génère un coût immédiat en trésorerie et la diversité des risques s’accommoderait mal d’une protection par un tiers.
En tant qu’instruments de gestion du risque, les pactes d'actionnaires occupent une place prépondérante dans la pratique des affaires. En permettant aux actionnaires d'organiser leurs relations dans un cadre moins rigide et plus confidentiel que celui des statuts, ils complètent utilement le droit des sociétés, parfois jugé inadapté ou insuffisant pour atteindre les objectifs que se sont fixés ces actionnaires.
La diversité des objectifs a induit une infinie variété des conventions : clauses de rachat, de plafonnement, pactes de non agression, clauses d'inaliénabilité, stipulations de sortie conjointe ou drag along, clauses omelette ou Texas shot. Si les appellations peuvent paraître exotiques au profane, les mécanismes juridiques sont souvent d’une banalité affligeante : promesses de vente, pactes de préférence ou promesses de porte-fort.
L’objet de cette étude n’est pas de dresser un exposé empirique sur les pactes d’actionnaires. Ce sont en tant qu’instruments d’anticipation des risques de la vie sociale que les pactes d’actionnaires seront examinés. L’investissement dans une société présente toujours un risque : risque d’une baisse de valeur des parts que l’investisseur a souscrit, risque d’un sous-évaluation du passif social, risque d’intrusion dans la société d’un