L'assommoir emile zola chapitre 2 : les désirs de gervaise
Dans cet extrait du chapitre 2 de L'Assommoir, roman naturaliste de Emile Zola, Gervaise a été abandonnée avec ses deux enfants par Lantier. Coupeau, un honnête ouvrier qui loge dans le même hôtel est sincèrement amoureux d’elle et tente de la séduire. Ils échangent donc des propos sur leurs histoires et projets respectifs au sein de l’Assommoir, bar où se confrontent déjà leurs désirs et la fatalité qui pèse sur eux. Moment programmatique du roman, cet épisode traduit le projet de Zola dans l’exposition de la fatalité du sort ouvrier. Mais déjà, il réussit à ne pas faire de ses personnages, la simple illustration mécanique de ses théories et à leur donner vie et humanité.
Gervaise avait repris son panier. Elle ne se levait pourtant pas, le tenait sur ses genoux, les regards perdus, rêvant, comme si les paroles du jeune ouvrier éveillaient en elle des pensées lointaines d’existence. Et elle dit encore, lentement, sans transition apparente :
— Mon Dieu ! je ne suis pas ambitieuse, je ne demande pas grand-chose… Mon idéal, ce serait de travailler tranquille, de manger toujours du pain, d’avoir un trou un peu propre pour dormir, vous savez, un lit, une table et deux chaises, pas davantage… Ah ! je voudrais aussi élever mes enfants, en faire de bons sujets, si c’était possible… Il y a encore un idéal, ce serait de ne pas être battue, si je me remettais jamais en ménage ; non, ça ne me plairait pas d’être battue… Et c’est tout, vous voyez, c’est tout…
Elle cherchait, interrogeait ses désirs, ne trouvait plus rien de sérieux qui la tentât. Cependant, elle reprit, après avoir hésité :
— Oui, on peut à la fin avoir le désir de mourir dans son lit… Moi, après avoir bien trimé toute ma vie, je mourrais volontiers dans mon lit, chez moi.
Et elle se leva. Coupeau, qui approuvait vivement ses souhaits, était déjà debout, s’inquiétant de l’heure. Mais ils ne sortirent pas tout de suite ; elle eut la curiosité d’aller regarder, au fond, derrière la