L'eau dans tous les matins du monde
Dans la littérature et la mythologie, l’eau est souvent investie de significations symboliques multiples. Ainsi, dans la poésie baroque, l’eau qui coule symbolise souvent l’instabilité, l’impermanence et le passage du temps. Fleuve et rivière (Seine et Bièvre), pluie, humidité, larmes, barque, etc. : les motifs liés à l’eau sont récurrents dans le récit de TLMM. Il n’est pas évident de distinguer les différents plans, descriptif, symbolique, mythique, concernés par ces motifs tant ceux-ci tissent un réseau serré. Quel rôle joue ce réseau ?
I. L’eau pour accentuer l’isolement dans la nature : entre calme et sauvagerie
Demeure des SC = atmosphère de retour à l’état de nature ; eau porteuse de toutes les connotations de cette mise à l’écart de la civilisation : calme paradisiaque, éveil de la sensualité, sauvagerie…
A. Un élément-clé de la « retraite » de SC
Maison des SC au bord de la Bièvre, affluent de la Seine : rivière dit le décentrement par rapport au fleuve majeur, la Seine. Du coup, rivière symbolise la distance avec Paris, voir le chemin à parcourir pour atteindre la capitale : « M. de SC se leva, suivit la Bièvre jusqu’au fleuve, suivit la Seine jusqu’au pont de la Dauphine… » (chp. III). Et lorsque Maugars pousse MM à aller voir SC, il précise que celui-ci « habitait au-delà du fleuve » (p. 31). Eau dit la périphérie, l’éloignement de la cité.
Eau tient une place importante dans l’atmosphère champêtre, à la fois bucolique et rustique, de la demeure de SC : flore (notamment saules) et faune (poissons) aquatiques sont plusieurs fois mentionnées. Chp. II, les petites filles pêchent la « friture » dans la Bièvre ; évocation des saules, des pêcheurs, des chevesnes et des goujons au chp. VI, quand SC est sur sa barque. Là encore, c’est le calme sauvage opposé à la frénésie urbaine, et d’ailleurs SC dit à Caignet : « Ma cour, ce sont les saules qui sont là, l’eau qui court, les chevesnes, les goujons et les fleurs du sureau. » La