"L'empreinte de l'ange", n.huston
Éditions Actes Sud / Léméac, 1998, 328 pages.
Lu du 1er au 5 février 2006.
Extraits :
«Dans chaque histoire d'amour fou il y a un tournant ; cela peut venir plus ou moins vite mais en général cela vient assez vite ; la plupart des couples ratent le tournant, dérapent, font un tonneau et vont s'écrabouiller contre le mur, les quatre roues en l'air. La raison en est simple : contrairement à ce qu'on avait cru pendant les premières heures, les premiers jours, tout au plus les premiers mois de l'enchantement, l'autre ne vous a pas métamorphosé. Le mur contre lequel on s'écrase après le tournant, c'est le mur de soi. Soi-même : aussi méchant, mesquin et médiocre qu'auparavant. La guérison magique n'a pas eu lieu. Les plaies sont toujours là, les cauchemars recommencent. Et l'on en veut à l'autre de ce qu'on n'ait pas été refait à neuf ; de ce que l'amour n'ait pas résolu tous les problèmes de l'existence ; de ce que l'on ne se trouve pas, en fin de compte, au Paradis, mais bel et bien, comme d'habitude, sur Terre.» (p. 193-194)
«- Tu aides à faire la guerre, alors ? dit Saffie en reculant. Ces mains elles touchent des clarinettes...et des fusils ? Elles tuent, ces mains ?Je te déteste !
- Saffie...
- Ne me touche pas ! Je hais la guerre ! András ! (Elle crie. Hystérique pour de vrai, cette fois.) Je vais te dénoncer à la police !
Il la gifle. De toutes ses forces. Juste une fois. Juste pour la calmer.
Et, oui, cela la calme... Elle met ses deux mains, superposées, sur sa joue en feu.
Ahuri par cette explosion de violence entre les deux êtres qu'il adore, Emil lâche sa flûte-courge et regarde, sans pleurer, de l'un à l'autre.
En fait - ils ne se le disent pas mais tous deux le savent - ils ont enfin touché là à l'essence de leur amour, à son noyau secret et sacré. En l'autre, c'est l'ennemi qu'ils aiment.
Le tournant est pris». (p. 227)
Biographie de l'auteure :
Nancy Huston est canadienne, née à Calgary en