L'exil anglais de voltaire
Voltaire a 32 ans. Cette expérience va le marquer d’une empreinte indélébile.
Il est profondément impressionné par la liberté et le pluralisme politique et religieux de la société anglaise. Alors qu’en France règnent les lettres de cachet, la loi d’Habeas corpus de 1679 - nul ne peut demeurer détenu sinon par décision d’un juge - et la Déclaration des droits de 1689 protègent les citoyens contre le pouvoir du roi. La réussite matérielle du peuple anglais suscite son admiration. Il fait le lien avec le retard de la France dans le domaine économique et l’archaïsme de ses institutions. Il estime que là où croit l’intensité des échanges marchands et intellectuels grandit l’aspiration des peuples à plus de liberté et de tolérance.
Il ne lui faut que quelques semaines pour acquérir une excellente maîtrise de l’anglais. En novembre 1726, il s’installe à Londres. Il rencontre des écrivains, des philosophes, des savants (physiciens, mathématiciens, naturalistes) et s’initie à des secteurs de la connaissance jusqu’ici ignorés de lui. Ainsi s’esquisse la mutation de l’homme de lettres en « philosophe », qui le conduit à s’investir dans des genres jusqu’alors considérés comme peu prestigieux : l’histoire, l’essai politique et plus tard le roman.
C’est en Angleterre qu’il conçoit le projet d’écrire une Histoire de Charles XII, roi de Suède et qu’il commence à rédiger en anglais l’ouvrage où il expose ses observations sur l’Angleterre, qu’il fera paraître en 1733 à Londres sous le titre Letters Concerning the English Nation et dont la version française n’est autre que les Lettres philosophiques.
Il se rapproche de la cour de Georges I puis de Georges II et prépare une édition de la Henriade en souscription accompagnée de deux essais en anglais qui remporte un grand succès (343 souscripteurs) et rétablit sa fortune. Une souscription analogue ouverte en France par son ami Thériot n’en rassemble que 80 et fera l’objet de nombreuses saisies de la police.