L'histoire de la littérature francaise
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I. À L'AUBE DE LA LITTÉRATURE La littérature française médiévale naît à l'ombre de l'Église. C'était normal à une époque où l'Église détenait le monopole de la culture, où le savoir était dispensé dans les monastères, à l'intention des oratores, les moines qui devaient pouvoir lire la Bible en latin et chanter les Psaumes à longueur de journée. Or, la langue de l'Église est le latin. C'est la langue de la culture, de l'écrit, parlée et entendue par les gens instruits (honesti) mais non par le commun (illiterati). Dans son souci pastoral de faire entendre et de répandre la Bonne Nouvelle, l'Église va «passer aux Gentils»: elle va, pour se faire comprendre, adopter la langue vulgaire dans la prédication. C'est ce qu'édicte un canon adopté au Concile de Tours, en 813: dans l'Empire carolingien la prédication devra se faire «in linguam rusticam gallicam aut theotiscam», autrement dit en langue vulgaire, «gauloise» ou «teutonne». C'est à ce souci de se faire comprendre qu'il faut probablement attribuer le premier texte en gallo-romain, Les Serments de Strasbourg (842), consigné dans une chronique par le moine Nithard, lui-même parent de Charlemagne. Il s'agit du texte qui scelle l'alliance entre deux des petits fils de l'empereur: Louis II le Germanique, roi des territoires germanophones, et Charles le Chauve, roi des Francs, contre leur frère aîné, Lothaire, alliance aboutissant au Traité de Verdun (843) et au partage de l'Empire. Le texte latin, langue «officielle» de la chronique, voisine avec la version en gallo-romain, prononcée par Louis le Germanique et avec celle en haut-allemand, prononcée par Charles le Chauve, chacun des deux chefs souhaitant se faire comprendre par les gens de l'autre. Les premiers textes en langue romane ou vulgaire seront marqués par un souci pastoral et édifiant, qu'il s'agisse de littérature homilétique, comme pour le Sermon sur le Livre de Jonas (vers 950), ou, surtout, de littérature hagiographique. Le plus ancien des textes