L'utopie - thomas more
L’ouvrage qui le rendit célèbre parut sous des titres différents : Traité de la meilleure forme de gouvernement, Livre d’or, « Discours du très sage Raphaël Hythlodée sur la meilleure forme de gouvernement », ou encore, Utopie ou le meilleur état de la République, « L’île nouvellement découverte d’Utopie, opuscule précieux, non moins salutaire qu’amusant ». < Pour des précisions sur cet aspect de la question, cf. J.Y. Lacroix, L’Utopie, Bordas, 1994, pp. 58-60.> L’ouvrage paraîtra à Louvain et à Paris. Il ne sera pas édité une seule fois en Angleterre au XVI° siècle (et Henri VIII ne l’a sans doute pas lu). Il faut attendre 1684 pour que le texte du « papiste » soit enfin publié dans son pays.
L’Utopie (Nulle-Part ou Nusquama) ou Eutopie (bon-lieu) n’est ni un code du genre humain ni un projet de paix universelle. More y décrit l’Etat utopien et Servier, qui a sans doute forcé le trait, a pu parler d’un « nationalisme utopien opposé à l’universalisme millénariste » (J. Servier, Histoire de l’utopie, Gallimard, p. 359). A vrai dire, la division de l’ouvrage est significative du projet morien : la première partie, rédigée en dernier, est une critique acerbe de l’Angleterre de l’époque ; la seconde décrit les mœurs et les institutions d’un peuple bienheureux. Ce qui montre que l’utopie, d’un point de vue logique, procède d’abord à une analyse critique qui va des maux de notre société (expropriations, brigandages, cruauté des peines) aux causes profondes qui