Au cabaret vert arthur rimbaud
Au Cabaret-vert, à cinq heures du soir
Depuis huit jours, j'avais déchiré mes bottines
Aux cailloux des chemins. J'entrais à Charleroi.
- Au Cabaret-Vert : je demandai des tartines
Du beurre et du jambon qui fût à moitié froid.
Bienheureux, j'allongeai les jambes sous la table
Verte : je contemplai les sujets très naïfs
De la tapisserie. - Et ce fut adorable,
Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs,
- Celle-là, ce n'est pas un baiser qui l'épeure ! -
Rieuse, m'apporta des tartines de beurre,
Du jambon tiède, dans un plat colorié,
Du jambon rose et blanc parfumé d'une gousse
D'ail, - et m'emplit la chope immense, avec sa mousse
Que dorait un rayon de soleil arriéré.
Octobre 70.
Tout d’abord, on constate que le poème « Au Cabaret-Vert » rappelle sur plusieurs plans le cheminement d’un voyageur.
Les indices spatiaux tels que « Charleroi », ou « Cabaret-Vert » nous apprennent que le poème se situe en Belgique. Le poème est daté : « Octobre 70 » et nous savons aussi que cette étape s’est passée « huit jours » après le départ du personnage. On en déduit alors que ce dernier a voyagé avant d’arriver en ce lieu, on peut donc le qualifier en tant que voyageur. Le titre du poème nous renseigne aussi sur le moment de l’évènement : « à cinq heures du soir ». Ces informations mettent dès le départ, le lecteur dans le contexte du poème. Il se glisse ensuite complètement dans la peau du personnage grâce à des effets de réels très prononcés nous dévoilant ses sensations (« jambon à moitié froid », « parfumé d’une gousse d’ail ») et ses pensées (« Et ce fut adorable », « Celle-là, ce n’est pas un baiser qui l’épeure »). On remarque également que l’utilisation de la première personne est omniprésente : « j’avais déchiré mes bottines », « j’allongeai les jambes », « m’apporta des tartines ».
En Octobre 1870, Arthur Rimbaud fugue de Paris (en état de siège) et se rend à Charleroi, une partie du voyage effectué