Bachelard reverie
Alors que le courant de pensée rationaliste héritier de Descartes définit encore l'être humain comme "être pensant et conscient", Bachelard cherche à mettre en doute cette "évidence" en la confrontant au cas du rêveur qui ne serait pas en mesure d'énoncer le "cogito ergo sum".
Après avoir rappelé l'évidence supposée du Cogito, Bachelard énonce sa problématique: le rêveur est-il bien sûr "d'être l'être qui rêve son rêve"? Bachelard rappelle la réponse cartésienne à cette question: "Pour lui (Descartes), penser, vouloir, aimer, rêver, c'est toujours une activité de son esprit. [...] C'était lui, bien lui, lui seul qui avait passion et sagesse". Mais devant l'insuffisance de cette réponse qui ne résiste pas au doute soulevé par le rêve, Bachelard avance sa thèse: "le rêve de la nuit est un rêve sans rêveur".
L'analyse du texte nous aménera à faire la distinction entre l'être conscient et le rêveur, mais aussi entre le rêve de la nuit et la rêverie, qui, de deux façons différentes, contribuent à réfuter la thèse de Descartes. Si le rêve de la nuit ne permet pas de dire "j'existe", la rêverie ne permet pas de dire "je pense".
Après avoir étudié la thèse de Bachelard, nous reviendrons sur les éléments essentiels sur lesquels repose sa critique du cogito, critique qui sera comparée à celle plus radicale faite près d'un siècle plus tôt par Nietzsche.
Première partie
Dans la première partie du texte, Bachelard se définit comme philosophe, c'est-à-dire comme quelqu'un qui s'efforce de réfléchir par lui-même sur le fond des choses, à la recherche de la vérité. L'emploi de la première personne du singulier est la marque d'une démarche philosophique qui s'interroge et accepte de remettre en cause ses acquis afin "d'éclairer ses enquêtes". Le premier de ces acquis, que Bachelard partage avec toute une tradition philosophique et qu'il a lui-même transmise à des générations d'étudiants est le fameux Cogito ergo sum de Descartes.
Descartes est un