Balzac, le médecin de campagne
Si cette cuisine, enfumée comme celle d'une auberge, était garnie d'ustensiles en nombre suffisant, ce luxe était l'oeuvre de Jacquotte, ancienne servante de curé, qui disait nous, et régnait en souveraine sur le ménage du médecin. S'il y avait en travers du manteau de la cheminée une bassinoire bien claire, probablement Jacquotte aimait à se coucher chaudement en hiver, et par ricochet bassinait les draps de son maître, qui, disait-elle, ne songeait à rien ; mais Benassis l'avait prise à cause de ce qui eût été pour tout autre un intolérable défaut. Jacquotte voulait dominer au logis, et le médecin avait désiré rencontrer une femme qui dominât chez lui. Jacquotte achetait, vendait, accommodait, changeait, plaçait et déplaçait, arrangeait et dérangeait tout selon son bon plaisir ; jamais son maître ne lui avait fait une seule observation. Aussi Jacquotte administrait-elle sans contrôle la cour, l'écurie, le valet, la cuisine, la maison, le jardin et le maître. De sa propre autorité se changeait le linge, se faisait la lessive et s'emmagasinaient les provisions. Elle décidait de l'entrée au logis et de la mort des cochons, grondait le jardinier, arrêtait le menu du déjeuner et du dîner, allait de la cave au grenier, du grenier dans la cave, en y balayant tout à sa fantaisie sans rien trouver qui lui résistât. Benassis n'avait voulu que deux choses : dîner à six heures, et ne dépenser qu'une certaine somme par mois. Une femme à laquelle tout obéit chante toujours ; aussi Jacquotte riait-elle, rossignolait-elle par les escaliers, toujours fredonnant quand elle ne chantait point, et chantant quand elle ne fredonnait pas.
Le XIXème est le siècle des révolutions sur le plan politique. Le peuple s'insurge, prend la parole, le peuple entre en politique. Le peuple et les basses gens se cherchent une place dans une société qui a aboli les ordres, qui a abattu les cloisons entre les classes sociales. Ainsi, la littérature se fait l'écho de