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Le crucifié est un peu particulier : le caractère juif de Jésus est rappelé par des objets religieux : Le châle juif (talith) autour de la taille ; à ses pieds le chandelier dissymétrique à 7 branches (ménorah) ; l’inscription au-dessus de sa tête semble en caractères hébraïques.
Cependant la croix, l’échelle, la position du corps sont fidèles aux représentations chrétiennes.
Dans le ciel, les personnages qui pleurent le crucifié sont des vieillards à longue barbe et à la tête couverte, avec une femme également voilée.
Ils peuvent être une représentation de juifs pieux, ou plus probablement des patriarches de la Torah avec Rachel.
Le tableau rappelle que Jésus, l’inspirateur de la religion chrétienne, est d’abord un juif pieux, qui s’inscrit dans la tradition d’Israël.
En 1938, Jésus est surtout une figure qui permet de représenter les souffrances infligées aux juifs, une allégorie de cette souffrance. En effet, depuis 1933 les persécutions se sont multipliées en Allemagne ; au printemps de 1938 l’annexion de l’Autriche s’accompagne d’humiliations publiques plus violentes pour les juifs autrichiens que pour ceux qui vivent en
Allemagne - voir bibliographie.(Note : la conception du tableau est certainement antérieure au pogrom de novembre 1938 dit Nuit de cristal).
Par sa biographie Marc Chagall est à la convergence des deux traditions : né dans une famille juive pratiquante, au coeur d’une ville à demi peuplée de juifs (Vitebsk vers 1900), il a été envoyé par sa mère dans une école chrétienne. Depuis son installation en France en 1923, il fréquente surtout des amis et artistes chrétiens catholiques. Cependant il se dit bouleversé par son voyage en Palestine en 1931, où il peint le Mur des Lamentations et le
Tombeau de Rachel.