Cinéma expérimental
La recherche de l’élément fondateur amène la réflexion du cinéma sur lui-même. Il part en quête de son ontologie propre. Il y a alors un paradoxe de la notion d’expérimentation. Loin d’être une avancée, un « toujours nouveau », elle est un retour, un mouvement régressif de la pensée vers l’origine… Les films directs ont comme « élément fondateur » la pellicule elle-même, son défilement. Ce sont des films sans caméra, c’est-à-dire libérés de la perspective et d’une hypothétique reproduction du réel… Le film m’advient donc directement.
Il me semble que les trois réalisateurs cherchent à atteindre à une forme de sensation visuelle pure. Cette sensation, ce lien « énergétique » à l’image, passe par un malaxage de la pâte visuelle très poussé et personnel.
On croit apercevoir des fantômes, des êtres humains qui apparaissent puis disparaissent aussitôt dans les brumes du photogramme. Des éléments organiques non identifiés (et identifiables) comme des éclats d’avant l’ordre, avant la classification, un espèce d’état chaotique, magmatique, plein d’énergie sans cesse renouvelé.
La matière devient organique. On distingue des molécules… Quand la matière se fait vivante, on assimile les images à la peau, aux nervures, à la digestion, au placenta, à la transparence donc à l’eau. La matière première de l’homme c’est l’eau. Le fameux dialogue se fait à partir de là : le géologique, le minérale, l’air… Comment la matière se structure-t-elle ? A travers cette question se pose celle de Dieu.
Poser le problème de la matérialité de l’image induit donc un positionnement réflexif du spectateur sur l’image. Face à ces films, le spectateur se doit de trouver ses « contrats de lecture