Commentaire de "soleils couchants" (verlaine, poèmes saturniens)
I.Une douce berceuse
a) Une musicalité simple
Vers de 5 pieds (pentasyllabes) : cf le précepte de Verlaine « De la musique avant toutes choses/Et pour cela préfère l’Impair » => la structure métrique du poème semble donc répondre par avance à ce mot d’ordre verlainien, mais confère également à « Soleils couchants » une certaine simplicité musicale. Un poème qui devient proche de la comptine : vers courts, répétitions lexicales (« la mélancolie », v3 et 5, « soleils couchants » aux v4 et 8), parallélismes syntaxiques (les deux premiers quatrains sont des phrases simples, du type sujet-verbe-complément qui reposent sur la même structure syntaxique).
Une impression de simplicité qui est donnée également par les rimes : rimes suivant un schéma presque répétitif (rimes croisées, à l’exception des v14-15 – et nous aurons l’occasion de revenir sur cette particularité) et surtout rimes assez pauvres =>pas de grande ingéniosité dans la recherche des rimes, puisque la plupart d’entre elles sont dues à une répétition lexicale (reprise du même mot en fin de vers) ; c’est le cas par exemple aux vers 3 et 5.
b) Une comptine qui se fait berceuse
Grande douceur du poème qui fait d’elle une berceuse - d’autant plus que l’image des soleils couchants appelle la nuit et donc la berceuse. Cf par exemple le premier vers « une aube affaiblie » : un quasi-pléonasme (la lumière est déjà faible à l’aube) renforcé par l’allitération en « b » => un cadre tamisé qui est celui de la berceuse
Douceur à travers le choix des sonorités : l’allitération liquide (en « l ») qui emplit les vers 3 et 5 par la seule expression « la mélancolie » et que l’on retrouve à plusieurs reprises dans le texte (« affaiblie » v1, « les champs » v2, « soleils » v4, « s’oublie » v7), « défilent » v12 et 13, « les grèves » v11 et 16) => douce musicalité du poème
Une douceur évoquée littéralement par le poète : « Berce de doux chants » (v7)