L’hirondelle
L’hirondelle a choisi nos demeures et s’en est emparée sans façon : elle est logée dans nos cheminées, sous nos toits, sous nos fenêtres mêmes. Elle n’a aucune peur de nous : on ne dira pas qu’elle se fie à la vitesse de son aile, puisqu’elle ne craint pas non plus de mettre son nid, ses enfants à notre portée. Voilà pourquoi elle est devenue la maîtresse de la maison. Le foyer est à elle : où la mère est niché, nichent la fille et la petite-fille, elles y reviennent chaque année dès que les froids ont disparu, et que les rayons d’un soleil printanier les ont remplacés. Leurs générations s’y succèdent plus régulièrement que les nôtres. Souvent une famille s’est éteinte ou dispersée : la maison a passé en d’autres mains : l’hirondelle y est toujours revenue, elle y a maintenu son droit d’occupation. C’est ainsi que cette aimable voyageuse s’est trouvée le symbole de la fixité du foyer. Elle y tient tellement que la maison réparée, démolie en partie, n’en est pas moins reprise et occupée par ces oiseaux fidèles et persévérants dans leurs souvenirs. Qui donc es-tu, petite hirondelle, qui toujours reviens à notre foyer ? Ah ! Si tu as une âme, dis-le-moi franchement, et dis-moi cet obstacle qui sépare les vivants des morts. Demain nous ne serons plus : nous sera-t-il donné de revenir à tire-d’aile revoir ce foyer, nos plus chères délices ; de dire un mot encore, en langue d’hirondelle, à ceux qui se souviendront de nous ?

L’art de donner Turenne aperçut un jour dans son armée un officier d’une naissance distinguée, mais peu riche et très mal monté. Il le prie à dîner avec lui, le tire en particulier après le repas, et lui dit avec bonté : « Monsieur, j’ai une prière à vous faire : vous la trouverez peut-être un peu hardie, mais j’espère que vous ne voudrez pas refuser à votre général. Je suis vieux, continua-t-il, et je ne jouis pas d’une bonne santé. Les chevaux vifs me fatiguent et je vous en ai vu un sur lequel je serais, je crois, fort à mon