Dépend-il de nous d’être heureux ?
Quelque chose qui dépend de nous est quelque chose qui se produit comme nous le voulons. Nous voulons bien-sûr tous être heureux, mais pouvons-nous l’être comme nous le voulons ? Si le bonheur, comme l’étymologie du mot l’indique, est ce qui nous arrive de bon ou de bien, il est alors évident qu’être heureux ne dépend pas de nous mais relève uniquement de la chance, du hasard, de la Fortune.
On a beau même tout avoir pour être heureux, un malheur est si vite arrivé, comme on dit, et la Fortune nous reprend ce qu’elle nous avait donné. Mais on est aussi persuadé qu’il ne faut pas tout attendre de la chance et que l’on a aussi à construire son bonheur, et s’activer pour acquérir tous ces biens qui font, selon nous, notre bonheur : inutile pour cela de faire des rêves extravagants ; par exemple, Rousseau disait qu’un ami fidèle, une compagne et une vache y suffiraient.
Ainsi, il dépend et du hasard et de nous d’être heureux.
Il s’agit cependant, non pas de faire la part du hasard et la nôtre dans notre bonheur : cette démarche conduirait à décrire en deux parties indépendantes et juxtaposées, les conditions du bonheur, et nous ferait conclure superficiellement qu’il y en a qui n’ont jamais de chance et accumulent les malheurs, tandis que d’autres ont une chance insolente. Au lieu de cela, il faut dégager un problème.
On peut choisir celui-ci : à quelles conditions notre bonheur peut-il ne dépendre que de nous ? Si l’on peut se rendre indépendant de tout ce qui nous arrive, se libérer de l’emprise des circonstances, être heureux en dépit de tout, de quoi est donc fait un tel bonheur ? Mais quel est ce nous dont dépend le bonheur : chaque homme, chacun de nous, ou tous ? Une autre question peut se poser alors : le bonheur n’est-il qu’une affaire personnelle à laquelle chacun travail selon un