Dans l'évocation de la Renaissance florentine, Musset avait aussi de quoi constater bien des points communs avec les années que la France venait de vivre : même climat d'agitation sociale, même déconvenue des idéaux républicains. Comment son Lorenzaccio se situe-t-il dans le contexte politique de 1830-1833 ? Ces années sont caractérisées par les mouvements révolutionnaires qui secouent l'Europe (France, Belgique, Pologne, Italie). Jean Pommier (Variétés sur Alfred de Musset et son théâtre, 1944) établit que Musset a connu, dès 1832, une exilée politique qui, l'année précédente, avait participé à l'insurrection de la Romagne contre le pouvoir pontifical, la Princesse Belgiojoso, modèle possible de la marquise Cibo. Mais c'est surtout l'état d'esprit de la jeunesse libérale française qui inspire Lorenzaccio : les étudiants révoltés à Florence contre la tyrannie d'Alexandre ressemblent aux combattants des barricades de juillet 1830, ou à ceux de 1832, qu'évoquera Victor Hugo dans Les Misérables. Ils sont les victimes de guides éloquents et mous, comme Philippe Strozzi, comme La Fayette. De même que, Cosme succédant à Alexandre, la cause de la liberté ne gagne rien à l'exploit de Lorenzo, de même, en France, les Républicains sont floués : Louis-Philippe succède à Charles X, il « escamote » la Révolution, et les morts de 1830 sont morts pour rien. D'autre part, l'intention hostile qui dicte à Musset le rôle du cardinal Cibo relève de la sensibilité du temps. Elle se rattache à l'anticléricalisme virulent qui se manifeste pendant les premières années de la Monarchie de Juillet. Elle fait écho à certains vers de La Coupe et les lèvres (IV,1) et annonce certaines pages de La Confession d'un enfant du siècle. Mérimée, Hugo dans Notre-Dame de Paristémoignent à l'égard des hommes d'Église de sentiments voisins. | L'Histoire est conçue par Musset comme la forme moderne de la fatalité. Loin des conceptions de Michelet faisant de l'Histoire le récit d'un combat