La faible présence de la femme dans les romans de Jules Verne est à un tel point notoire que l’auteur s’est souvent fait qualifié, à tort ou à raison, de misogyne. En effet, comme on ne retrouve que très peu de personnages féminins dans ses écrits, et qu’ils ne sont généralement pas bien étoffés, il est logique de croire que la féminité est problématique chez Jules Verne. Dans le roman Le Tour du monde en 80 jours, la figure féminine est contradictoire : elle ne correspond pas tout à fait aux profils de femmes que l’on retrouve dans la majorité des récits de Verne. Cependant, quoiqu’on dénote une présence inhabituellement accrue du personnage de Mrs. Aouda dans le roman, il n’échappe tout de même pas au manque de profondeur ainsi qu’aux stéréotypes qu’on attribue généralement aux autres figures féminines verniennes. En effet, surtout en opposition au personnage froid et mathématique qu’est Phileas Fogg, la beauté indienne apparaît au lecteur comme un véritable cliché d’irrationalité, tout en émotions qu’elle est. Plusieurs études se sont d’ailleurs penchées sur la question de la présence – ou plutôt de l’absence – de la femme dans ses romans, certaines allant même jusqu’à démontrer que la sexualité, voire la maternité, sont refoulées chez l’auteur : elles seraient en fait symboliquement exprimées dans la présence et dans les descriptions de la nature et des paysages, plutôt que dans les figures féminines en tant que telles. En ce sens, le roman Le Tour du monde en 80 jours[1] n’y fait pas exception puisque cette féminité refoulée s’exprimerait en fait dans le combat contre la nature, ennemie principale de Fogg dans sa course contre le temps et l’espace, plutôt que dans le personnage d’Aouda, qui lui, est relégué au second plan et devient plus ou moins sans importance.

Tout d’abord, il est important de dénoter que l’impression d’absence des figures féminines qu’a le lecteur dans les écrits de Jules Verne ne relève peut-être pas uniquement de la perception