Jazz et vocalité
Le jazz est intimement lié à la vocalité par son histoire, sa construction, ses recherches de sonorités tant instrumentales que vocales et l'accompagne tout au long de son évolution. En effet dans cette musique issue d'une tradition orale, la vocalité est omniprésente dans les préoccupations musicales de ses interprètes. Les chanteurs pratiquent leur tractus vocal comme un instrument et les instrumentistes recherchent l'expression de l'intimité émotionnelle propre à la voix, au travers de leurs instruments respectifs. Même si l'on retrouve ce désir de faire chanter l'instrument dans la musique savante européenne bien avant la naissance du jazz (on parle, par exemple, de bel canto instrumental ou de cantabilita pianistique, chez Chopin ou Liszt) et que l'on assiste à un élargissement de la vocalité dépassant le discours dans la musique contemporaine, la relation de la musique jazz à la vocalité est particulièrement nécessaire à son appréhension.
A l'origine du jazz était donc la voix, celle d'une humanité déracinée, privée d'identité. Le chant advient comme seul outil de communication, seule affirmation identitaire possible. Les esclaves privés de la parole s'expriment par le chant. En effet les esclaves étaient autorisés par leurs gardiens à chanter durant leur temps de travail, entre autres quand ils réalisaient des travaux pénibles dans lesquels ils devaient coordonner leurs efforts. Par exemple ils avaient l’habitude d’interpréter des chants appelés chains gang quand ils travaillaient sur la route ou autre construction. Mais les négriers les autorisaient aussi à chanter des chants plus calmes s’ils n’avaient pas de rapport avec leurs employeurs. De plus vers la moitié du XVIIe siècle l'évangélisation des esclaves se met en place et leur donne accès au chant durant les offices religieux leur étant réservés. Le chant repris ainsi la place importante qu’il avait dans les communautés africaines. Dans la « préhistoire » du jazz la voix