Justice et société rurale
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L’action publique est engagée au nom de la société puisqu’elle vise non pas à réparer un préjudice personnel mais à réprimer un trouble à l’ordre publique. Dans le cadre de procédures engagées suite à des troubles à l’ordre publique on assiste souvent à une très forte adaptation du droit, c’est-à-dire à des « arrangements ». Les exemples développés ici concerneront les manifestations paysannes des années 1950-1960.
Même si des actions similaires avaient déjà été observées dans les décennies précédentes, les premiers « vrais » barrages routiers datent des années 1950 et sont généralisés dans le midi viticole au cours des manifestations d’août 1953. Le préfet, dans l’intension de justifier les faibles poursuites, insiste alors sur la dimension folklorique de l’action. Le barrage ne serait qu’une mise en scène de la collectivité villageoise. Le mois suivant, la technique est réutilisée par les fédérations Sud-ouest de la FNSEA mais l’approche des autorités n’est plus du tout la même. Une note du cabinet du ministre fait d’ailleurs part de l’inquiétude de celui-ci face à l’indulgence des autorités judiciaires et souligne la nécessité d’une plus grande fermeté. Cette indulgence était en partie liée à des lacunes dans le droit. La seconde moitié de la décennie voit néanmoins la lente élaboration d’un arsenal juridique plus adapté. Tandis que le droit est enfin adapté en 1958, les barrages prennent de nouvelles formes notamment dues à la diffusion du tracteur et ne sont plus