La disparition de grisèle
L’article est publié dans un journal américain.
Extrait du livre Inconnu à cette adresse de Kressmann Taylor
Schloss Rantzenburg,
Munich, Allemagne
Le 12 février 1934
Mr Max Eisenstein
Galerie Eisenstein
San Fancisco,
Californie, USA
Max, mon vieil ami,
Mon Dieu, Max, sais-tu ce que tu es en train de faire ?
Je vais devoir essayer de faire sortir clandestinement cette lettre en la confiant à un Américain que j’ai rencontré ici. Tu ne peux pas imaginer mon désespoir :ce télégramme fou, ces lettres que tu m’as envoyés… Rien de tout cela ne m’est parvenu directement mais on m’a convoqué : ils me les ont montrés et m’ont sommé de m’expliquer ; ils exigent que je leur donne le code. Quel code ? Comment toi, un ami de toujours, peux-tu me faire une chose pareille ?
Te rends-tu compte que tu es en train de me détruire ? Les résultats de ta folie sont déjà terribles. On m’a révoqué de mon poste de fonctionnaire. Heinrich a été renvoyé des Jeunesses hitlériennes sous le prétexte qu’il a une trop petite santé pour militer dans cette organisation. Dieu du ciel, Max, ne comprends-tu pas ce que cela signifie ? Et Elsa, à qui je n’ose rien dire, qui ne comprend pas pourquoi les notables locaux refusent soudain ses invitations… Et le baron Von Freische qui ne la salue plus quand il la rencontre dans la rue…
Oui, bien sûr, je sais pourquoi tu as fait ça. Mais ne vois-tu pas que je ne pouvais pas intervenir ; que je n’ai même pas osé tenter d’intervenir ? Je t’adjure maintenant, du fond de l’âme, d’arrêter, non pour moi, mais pour Elsa et les garçons. Pense ce que cela signifierait pour eux si on m’emmenait et qu’ils ne sachent même pas si je suis vivant ou mort. Sais-tu ce que c’est qu’être envoyé dans un camp de concentration ? Veux-tu vraiment me coller le dos au mur et pointer une mitraillette sur moi ? Je t’en supplie, cesse ! Cesse maintenant que tout n’est pas encore totalement