Peu de révolutions artistiques auront été aussi explicites et marquantes. En plein contexte de la Contre-Réforme, où le Concile de Trente préconise une peinture noble et lisible, le Caravage cherche à peindre une vérité qui refuse les conventions et ne recule pas devant la laideur. Par son sens révolutionnaire du sacré, il subs- titue un naturalisme extrême aux artifices du maniérisme. Fidèle à la nature et très influencé par Michel-Ange, il fait du corps humain le véritable objet de sa peinture. Son œuvre puissante et novatrice révo- lutionne la peinture du XVIIe siècle par son réalisme parfois brutal, son érotisme troublant et l’invention de la technique du clair-obscur qui inspirera nombre de grands peintres après lui.
Il ouvre la voie, par une peinture méditative et intime, à une explo- ration anxieuse de l’âme (démarche poursuivie ensuite par Rembrandt dans le contexte plus austère du protestantisme hollandais). Par sa volonté de témoigner des émotions humaines, il cherche à rendre tangibles les événements religieux qu’il représente comme des scè- nes de genres. Humanisant l’art sacré, sa vision crue et sa piété intime s’opposent totalement à l’approche préconisée alors. Mais, même si ces toiles sont souvent refusées, les artistes et les intellectuels de son époque le reconnaissent comme un inventeur de génie.
Libérant les artistes des stéréotypes maniéristes et amorçant une nouvelle approche de la réalité physique des choses, la peinture du Caravage connaît une diffusion rapide et étendue en Europe. Le caravagisme ne se cantonne pas à un cadre stylistique. Il peut être rapproché aussi bien des références et de la rigueur classique d’un Georges de La Tour que des emphases baroques de Rubens.
LE CARAVAGE : LA VIE
Né en 1571 à Milan, Michelangelo Merisi da Caravaggio s’installe très vite à Rome, dès 1592. La ville est en effet le creuset où se retrouvent des artistes de toutes origines (Annibal Carrache est bolonais, Simon Vouet est français, José de Ribera