Ce soir-là, Damon me proposa de jouer aux cartes avec lui et ses amis soldats, dont le camp était pour le moment établi à Leestown, à une trentaine de kilomètres. — Je ne partage pas toujours leurs points de vue, mais ce sont de sacrés bons joueurs et ils sont tout aussi redoutables pour ce qui est de tenir l’alcool, me raconta mon frère. J’avais accepté son invitation de me joindre à lui – tout plutôt que de croiser Père et de devoir supporter d’autres histoires de vampires ! Mais, quand la nuit commença à tomber sans que j’aie vu trace de Katherine ou d’Emily, je regrettai d’avoir accompagné Damon. J’avais toujours l’esprit embrouillé et j’aurais voulu pouvoir passer une autre nuit auprès de Katherine, afin de m’assurer que mon désir ne m’éloignait pas du droit chemin. Je l’adorais, mais mon côté raisonnable et logique rendait ardue la tâche consistant à désobéir à Père. — Prêt ? demanda Damon à l’heure du crépuscule, debout devant ma porte, dans son uniforme. J’acquiesçai d’un hochement de tête. Il était trop tard pour faire machine arrière de toute façon. — Bien, répondit-il, un large sourire aux lèvres. Il dévala l’escalier bruyamment tandis que je jetai un œil par la fenêtre, l’air triste et rêveur, en direction de l’annexe. Pour finir, je suivis mon frère. — Nous partons au campement, cria Damon à l’intention de Père en passant devant son bureau. — Attendez ! (Père émergea de la pièce et se précipita dans le salon avec, dans les bras, plusieurs longues branches couvertes de minuscules bourgeons violets semblables à des fleurs de lilas – de la verveine.) Prenez ça ! ordonna-t-il. Il glissa un brin de verveine dans la poche de poitrine de nos vestes. — Il ne fallait pas, Père, commenta mon frère, laconique, tout en sortant le brin de sa poche pour le fourrer dans son pantalon. — Je t’ai donné toute latitude, fils, et un toit où dormir. À présent, tout ce que je te demande, c’est de porter ça. C’est bien peu de chose, non ? Père frappa sa paume si fort que je