Le mal
« On demande d’abord d’où vient le mal. Si Deus est, unde malum ? si non est , unde bonum ? », (Leibniz, Essais de théodicée, ,I,20).
La question du mal et de ses origines est une question récurrente depuis toujours. Les hommes, en s’interrogeant sur la naissance du mal, ont installé les bases essentielles des cosmogonies, des théogonies et des anthropogonies. Les trois œuvres du programme ( Macbeth en 1606, la Profession de foi du vicaire savoyard en 1762 et Les Âmes fortes en 1949) sont traversées par une histoire qui les précède en les éclairant.
Le mal dans l’antiquité :
Si, comme l’écrivait Hegel, la naissance de la pensée occidentale est à situer en Grèce avec la naissance de la philosophie pendant ce « clair matin de l’esprit », il nous paraît indispensable de rappeler comment les grecs de l’antiquité voyaient et pensaient la notion de mal. Les termes grecs pour désigner le mal sont, au masculin, kakos (le méchant, celui qui commet le mal) et l’adjectif substantivé kakon (mauvais, méchant). Ces mots désignent le mal en général, mais surtout le mal au plan moral, c’est-à-dire celui qui est commis par l’homme. La notion grecque du mal forme chaine avec d’autres mots : ubris (la démesure) ; eris (la discorde, fille de nyx, la nuit, et mère de phonos, le meurtre, et de maché, le combat) ; polemos (la guerre) ; até (selon Homère, fille aînée de Zeus, divinité de la fatalité, incarnant la folie et l’égarement). Tous ces mots disent une forme de querelle au sein de l’Être de l’homme « en tant qu’il recèle une obscurité première que rien ne permet de lever tout à fait » (B. Sichère, Histoires du mal). La notion de fatalité est primordiale pour les grecs de l’antiquité. On l’appelle tuké (fortune, hasard, sort, destin). Robert Veron, dans un ouvrage intitulé Le mal dans la tragédie grecque (2003), souligne l’importance capitale de cette valeur. L’homme serait