Le président de la République, arbitre ou capitaine ?
ARBITRE OU CAPITAINE ?
« Tantôt je pense, tantôt je suis » affirmait Paul Valéry en pastichant la célèbre formule cartésienne, et l’on serait tenté de détourner de même la proposition de Jean Massot :
« arbitre et capitaine », le président de la République ne serait-il pas plutôt tantôt arbitre, tantôt capitaine ? En effet, à considérer la lettre de la Constitution du 4 octobre 1958, on ne peut manquer de relever son article 5, lequel confère le soin, au chef de l’État, d’assurer « par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État », ce qui suppose donc la constitutionnalisation d’un pouvoir neutre – comme aurait dit
Constant –, pouvoir neutre qui devait être, selon la volonté même des rédacteurs de 1958 et surtout du général de Gaulle, au-dessus des parties, afin de présider aux intérêts supérieurs de la France. Telle serait effectivement la forme d’un « monarque républicain », si Raymond
Janot n’avait dès septembre 1958 soulignait la polysémie du terme « arbitre », dont l’une des acceptions s’accorde assez bien avec l’image d’un chef de l’État qui serait également chef de gouvernement, image que la pratique constitutionnelle post-gaullienne a peu à peu forgée. En effet, chef d’État et chef d’une majorité parlementaire, le président de la République semble bien plutôt être celui qui, concentrant les pouvoirs, est à l’initiative de toutes les décisions, au point que l’on puisse voir en lui un capitaine dirigeant une équipe composée tout à la fois du gouvernement et du Parlement.
Or, depuis 1958, il apparaît que la lettre de la Constitution a parfois correspondu à la pratique, à la faveur d’un événement qui contraint le président de la République à n’être plus qu’arbitre après avoir été capitaine, un événement dont les récentes révisions constitutionnelles semblent condamner la survenue : la cohabitation. Ainsi, nous montrerons tout d’abord qu’en cas de fait