Le théatre de l'absurde
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la forme dramatique, comme la majorité des formes artistiques, traverse une période de remise en question. Les auteurs ressentent la nécessité de modifier profondément la forme théâtrale, tant au plan de l'écriture qu'au plan de la mise en scène. Sur la rive gauche de la Seine se créent de nombreux théâtres de poche, qui révèlent bientôt une nouvelle génération d'écrivains, au premier rang desquels Eugène Ionesco et Samuel Beckett.
L'Absurde
Dans les années quarante se développe en France la philosophie existentialiste, dont le représentant le plus connu est sans conteste Jean-Paul Sartre. Selon lui, en l'absence d'un Dieu, l'homme détermine lui-même son existence. Mais cette absence de Dieu, de croyance et de prédétermination, qui sous-entend à l'homme une totale liberté, peut également faire naître le sentiment de l'absurdité de l'existence. Albert Camus développe une réflexion sur cette notion dans Le Mythe de Sisyphe [1] : dans un univers privé de ses illusions et de ses lumières, explique-t-il, l'homme ressent une séparation entre son être et son existence, d'où naît le sentiment de l'absurde. Il observe trois attitudes de l'homme face à l'absurdité de la vie. L'homme croyant se réfugie dans la religion pour combattre l'absurdité. L'homme incroyant qui refuse d'accepter l'absurdité de la vie se suicide. Reste une troisième voie, que Camus explore à travers Sisyphe, celle de la révolte : pour lui, l'absurde ne prend sens que si l'on n'y consent pas. Pour mener sa réflexion, Camus s'appuie sur le mythe de Sisyphe, héros antique condamné par les dieux à pousser un rocher en haut d'une montagne. A chaque fois que Sisyphe est sur le point d'atteindre le sommet, le rocher tombe, et tout est à recommencer. Camus y voit à la fois un bonheur, parce que Sisyphe est totalement maître de son destin, et une tragédie, parce qu'il a pleinement conscience de l'absurdité de sa