Lecture analytique de l'excipit de bel ami (maupassant)
Excipit de Bel-Ami de Maupassant (1885)
Du Roy l’écoutait, ivre d’orgueil. Un prélat de l’église romaine lui parlait ainsi, à lui. Et il sentait, derrière son dos, une foule, une foule illustre venue pour lui. Il lui semblait qu’une force le poussait, le soulevait. Il devenait un des maîtres de la terre, lui, lui, le fils des deux pauvres paysans de Canteleu.
Il les vit tout à coup, dans leur humble cabaret, au sommet de la cote, au dessus de la grande vallée de Rouen, son père et sa mère, donnant à boire aux campagnards du pays. Il leur avait envoyé cinq mille francs en héritant du comte de Vaudrec. Il allait maintenant leur en envoyer cinquante mille : et ils achèteraient un petit bien. Ils seraient contents, heureux.
L’évêque avait terminé sa harangue. Un prêtre vêtu d’une étole dorée montait à l’autel. Et les orgues recommencèrent à célébrer la gloire des nouveaux époux.
Tantôt elles jetaient des clameurs prolongées, énormes, enflées comme des vagues, si sonores et si puissantes, qu’ils semblaient qu’elles dussent soulever et faire sauter le toit pour se répandre dans le ciel bleu. Leur bruit vibrant emplissait toute l’église, faisantfrissoner la chair et les âmes. Puis tout à coup elles se calmaient ; et des notes fines, alertes, couraient dans l’air, effleuraient l’oreille comme des souffles légers ; c’étaient de petits chants gracieux, menus, sautillants, qui voletaient ainsi que des oiseaux ; et soudain, cette coquette musique s’élargissait de nouveau, redevenant effrayante de force et d’ampleur, comme si un grain de sable se métamorphosait en un monde.
Puis des voix humaines s’élevèrent, passèrent au dessus de têtes inclinées. Vauri et Landeck, de l’opéra, chantaient. L’encens répandait une odeur fine de bonjoi, et sur l’autel le sacrifice divin s’accomplissait, l’Homme-Dieu, à l’appel de son prêtre, descendait sur la terre pour consacrer le triomphe du baron Georges Du Roy.
Bel-Ami, à genoux à côté de Suzanne, avait baissé le