Les 500 millions de la begum
Le chapitre V du roman de Jules Verne, intitulé « La cité de l’Acier », s’ouvre sur une présentation de cette ville, « propriété » industrielle du professeur Schultze.
Cette masse est Stahlstadt, la Cité de l’Acier, la ville allemande, la propriété personnelle de Herr Schultze, l’ex-professeur de chimie d’Iéna, devenu, de par les millions de la bégum (1), le plus grand travailleur du fer et, spécialement, le plus grand fondeur de canons des deux mondes.
5 Il en fond, en vérité, de toutes formes et de tout calibre, à âme lisse et à raies, à culasse mobile et à culasse fixe (2), pour la Russie et pour la Turquie, pour la Roumanie et pour le Japon, pour l’Italie et pour la Chine, mais surtout pour l’Allemagne. Grâce à la puissance d’un capital énorme, un établissement monstre, une ville véritable, qui est en même temps une usine modèle, est sortie de terre comme à un coup de baguette.
10 Trente mille travailleurs, pour la plupart Allemands d’origine, sont venus se grouper autour d’elle et en former les faubourgs. En quelques mois, ses produits ont dû à leur écrasante supériorité une célébrité universelle. Le professeur Schultze extrait le minerai de fer et la houille de ses propres mines. Sur place, il les transforme en acier fondu. Sur place, il en fait des canons.
15 Ce qu’aucun de ses concurrents ne peut faire, il arrive, lui, à le réaliser. En France, on obtient des lingots d’acier de quarante mille kilogrammes. En Angleterre, on a fabriqué un canon en fer forgé de cent tonnes. À Essen, M. Krupp est arrivé à fondre des blocs d’acier de cinq cent mille kilogrammes. Herr Schultze ne connaît pas de limites : demandez-lui un canon d’un poids quelconque et d’une puissance quelle qu’elle soit, il vous servira ce
20 canon, brillant comme un sou neuf, dans les délais convenus. Mais, par exemple, il vous le fera payer !