Les clés de lecture, Lorenzaccio, Alfred de Musset
UN LABYRINTHE D’INTRIGUES
Indubitablement, Lorenzaccio, à la première lecture notamment, apparait complexe, et peut-être même brouillon. Si la structure est certes touffue et difficile à suivre, elle n’en est pas pour autant moins rigoureusement façonnée. C’est en réalité le tissu d’intrigues qui compose la pièce, intrigues au nombre de trois : l’intrigue Cibo, l’opposition républicaine, et ce que l’on pourrait appeler Lorenzo et son double. Ces trois intrigues ont la particularité d’être doubles.
• Ainsi, il existe deux intrigues Cibo, étroitement liées. D’une part, la marquise, bien qu’il existe un flou sur ses véritables motivations, a pour but de faire changer le duc, d’en faire un républicain convaincu en faisant appel à sa raison. Par ailleurs, le cardinal intrigue aussi de son côté. Il cherche à diriger le duc et essaie pour cela de manipuler la marquise.
Il échoue, mais sort tout de même de la pièce en vainqueur, au contraire de Lorenzo qui, bien qu’étant parvenu à ses fins, apparait comme le perdant, son projet n’ayant abouti à aucun changement.
• De la même manière, il existe deux intrigues représentées par l’opposition républicaine incarnée par Pierre et Philippe Strozzi. Si ce dernier renferme en effet un bouillonnement d’idées et de discours, ceux-ci ne seront jamais mis en application et restent des principes. À l’inverse,
Pierre ne cesse d’agir, mais sans lucidité. Ces deux tenants d’un type de républicain finissent par annuler tout élan : l’inertie de l’un contrebalance la frénésie de l’autre.
• Le troisième élément qui tisse la pièce est incarné par Lorenzo et ses deux identités. Ce personnage double ne se révèle qu’au fur et à mesure de la pièce, délivrant les éléments du puzzle au compte-goutte. C’est ainsi que le lecteur découvre, par le biais de Lorenzo, deux intrigues : les deux premiers actes font peser un suspense dramatique sur la nature de Lorenzo. Mais la conversation de l’acte III