Les liaisions dangereuses-valmont
Choderlos de Laclos, Les liaisons dangereuses
Le libertinage : un épiphénomène du temps de Laclos ?
Introduction
« Ces mots roué et rouerie, dont heureusement la bonne compagnie commence à se défaire, étaient fort en usage à l’époque où ces Lettres ont été écrites. »[1]
Belle définition d’un trait de caractère commun aux trois illustres libertins dont il sera question dans cette dissertation, et avec laquelle Laclos a certainement tenté de stigmatiser un phénomène culturel de son temps, mais peut-être en des termes un tant soit peu optimistes : le libertinage. Certes le genre littéraire du roman libertin s’est limité au XVIIIe siècle, cependant Calvin avait déjà dû lutter pendant la première moitié du XVIe siècle contre les libertins spirituels, une secte mystique et panthéiste, et de nos jours le terme aurait tendance à coïncider avec une certaine catégorie de people, qu’on pourrait par exemple voir à l’œuvre dans le roman Glamorama de l’auteur new yorkais Bret Easton Ellis.
Mais la rouerie (autrement dit la ruse ou la dissimulation) qu’évoque Laclos n’est que l’un des aspects propre au libertin. D’ailleurs le terme libertin n’a pas une unité de sens, car il s’est opéré un changement de paradigme entre le XVIIe et le XVIIIe siècle. Par conséquent, il faudra d’une part s’attacher aux différentes caractéristiques du libertin pour tenter de comprendre sa nature, d’autre part considérer l’évolution de son comportement et de ses méthodes au fil du temps.
A cette fin, nous observerons trois illustres libertins – Dom Juan, Valmont et Dolmancé – dans le contexte, en décrivant leurs interactions avec d’autres personnages des œuvres dans lesquelles ils apparaissent : nous analyserons brièvement quelques passages du Dom Juan de Molière, des Liaisons dangereuses de Laclos et de la Philosophie dans le boudoir de Sade.
1. L’ancêtre du libertin : Dom Juan
Etymologiquement le terme libertin vient du latin libertinus, qui veut dire