Les grandes marées, analyse
De surcroît, il n’y a aucune trace humaine sur l’image, ce qui contribue à créer l’impression de la nature à l’état sauvage. Cependant, chaque fois que surviennent de grandes marées durant les quelques mois que traverse la diégèse du roman, arrive sur le lieu insulaire de l’action un nouveau personnage qui manifeste à sa manière la mentalité de consomma- tion, sinon un courant social contemporain : pour le lecteur, le phénomène maritime devient indissociable de cet événement humain dont il est l’indica- teur temporel. Les deux catégories d’événement se doublent par leurs cycles simultanés. L’expression titrale « les grandes marées » s’enrichit ainsi d’un sens figuré et contraire à son niveau littéral qui désigne un fait naturel : …afficher plus de contenu…
L’ironie sociologique de Poulin atteint là une dimension métaphysique et toujours actuelle : elle fait vivement sentir la menace que constitue la civilisation de masse, imper- sonnelle et parée d’artifices, sur le cœur de l’intériorité humaine. La notoriété de Poulin est corroborée par le Prix du Gouverneur général (le plus pres- tigieux au Canada, dans ce domaine) qu’il reçut en 1978 pour Les grandes marées, et par le Prix Athanase-David (le plus prestigieux au Québec) qui lui fut décerné en 1995 pour l’ensemble de son œuvre. 2 Cette piste de lecture est surtout suggérée par la critique anglo-saxonne. Par exemple :
Douglas O. Spettigue (374). 3 Sa longueur mesure deux kilomètres et sa largeur, un demi-kilomètre (Poulin,