masque nègre
Masque nègre
A Pablo Picasso
Elle dort et repose sur la candeur du sable.
Koumba Tam dort. Une palme verte voile la fièvre des cheveux, cuivre le front courbe.
Les paupières closes, coupe double et sources scellées.
Ce fin croissant, cette lèvre plus noire et lourde à peine – ou' le sourire de la femme complice?
Les patènes des joues, le dessin du menton chantent l'accord muet.
Visage de masque fermé à l'éphémère, sans yeux sans matière.
Tête de bronze parfaite et sa patine de temps.
Que ne souillent fards ni rougeur ni rides, ni traces de larmes ni de baisers
O visage tel que Dieu t'a créé avant la mémoire même des âges.
Visage de l'aube du monde, ne t'ouvre pas comme un col tendre pour émouvoir ma chair.
Je t'adore, ô Beauté, de mon oeil monocorde!
Prière aux masques
Masques! O Masques!
Masques noirs masques rouges, vous masques blanc-et-noir
Masques aux quatre points d'ou' souffle l'Esprit
Je vous salue dans le silence!
Et pas toi le dernier, Ancêtre à tête de lion.
Vous gardez ce lieu forclos à tout rire de femme, à tout sourire qui se fane
Vous distillez cet air d'éternité ou' je respire l'air de mes Pères.
Masques aux visages sans masque, dépouillés de toute fossette comme de toute ride
Qui avez composé ce portrait, ce visage mien penché sur l'autel de papier blanc
A votre image, écoutez-moi!
Voici que meurt l'Afrique des empires – c'est l'agonie d'une princesse pitoyable
Et aussi l'Europe à qui nous sommes liés par le nombril.
Fixez vos yeux immuables sur vos enfants que l'on commande
Qui donnent leur vie comme le pauvre son dernier vêtement.
Que nous répondions présents à la renaissance du Monde
Ainsi le levain qui est nécessaire à la farine blanche.
Car qui apprendrait le rythme au monde défunt des machines et des canons?
Qui pousserait le cri de joie pour réveiller morts et orphelins à l'aurore?
Dites, qui rendrait la mémoire de vie à l'homme aux espoirs