Pantagruel
|et le devenir comme un risque; conception qui dérive probablement des théories de la physique aristotélicienne dans laquelle|
|le mouvement requiert un agent extérieur, tandis que l'immobilité appartient à la nature. Par suite, la soumission au temps |
|constitue un élément primordial de l'idéal figuré dans le roman. «Voyez comment nature, voulent les plantes, arbres, |
|arbrisseaulx, herbes, et zoophytes, une fois par elle creez, perpétuer et durer en toute succession de temps, sans jamais |
|deperir les especes, encores que les individus perissent, curieusement arma leurs germes et semences, es quelles consiste |
|icelle perpétuité... » (chap. VIII). L'espèce l'emporte sur le libre arbitre individuel, son maintien dicte à toute conduite|
|humaine ses normes. |
|Cette soumission à la loi du temps s'accompagne, dans le roman, d'une soumission à l'autorité légitime, c'est-à-dire celle |
|qui elle-même reconnaît le temps et en dépend. Après sa longue enquête, Panurge s'en remet à la décision que prendra pour |
|lui le bon Gargantua, en toute confiance : « Pendent vostre absence », dit le vieux roi « je feray les apprestz et d'une |
|femme vostre et d'un festin, que je veulx à vos nopces faire celebre si oncques en feut » (chap. XLVIII). Et nul ne trouve à|
|redire devant cette abdication de la volonté individuelle, tous la trouvent sage au contraire. Cette démission de la |
|fantaisie devant la raison reproduit socialement la confiance que toute créature doit avoir en son Créateur, elle constitue |
|une reconnaissance d'un ordre supérieur auquel l'homme ne peut rien. Ce parti idéologique explique la fortune que connut |
|chez les «humanistes » la notion de «nature humaine ». Notion grâce à laquelle