Préface romain gary
J’aurais aimé croire, niaisement, que mon récit autobiographique n’ait besoin d’aucune justification, d’aucun avant-propos ni préface en l’honneur des incultes et naïfs critiques littéraires qui salissent notre monde. Plus forte que moi, ma tendance à éclaircir chacune de mes pensées, revient pareille à l’assuétude des grands drogués de ce monde. Je vois donc là une grande nécessité dans l’exposition de mes dires, tels qu’ils doivent être lus et vus. Les entités chargées du blâme, seulement, ont reçu ma vie avec un sursaut d’indignation. Ces personnes d’un angélisme à toute épreuve se sont senties vicieuses d’avoir lu cette chose détournée, mensongère, sur laquelle ils ont vomi toute leur immaturité. Pourtant, depuis le modernisme de Rousseau, l’intelligence de la critique aurait due évoluer. À croire que la connerie se transmet plus facilement que le savoir. Même si j’admire de toute mon ironie les gens capables d’autant d’absurdités dans une seule vie. En clair, personne ne devrait être écœuré devant l’expression d’un vécu, il faut posséder un taux d’humilité bien bas pour pouvoir prôner l’anathème à la vie d’autrui, il faut une estime de soi surdimensionnée pour penser avoir une grandeur libre d’être la juge de ces humains. Bien que je n’ai absolument pas le droit, dans ma position, de réclamer quelconques éloges - car il est vrai qu’à la publication j’ai conscience d’être soumis à ces juges parfaits – je me sens tout de même obligé d’argumenter devant ceux qui rougiront, à la cour de délibération des dires, d’un faux recul sur mon autobiographie. Après mon explication, ces derniers pâliront sans doute encore plus, comprenant certaines tristes conditions, ou quelques accroches familiales touchantes, mais ils pâliront pour le vrai cette fois. Censeurs, me voilà dans une désolante position, dans une position qui ne devrait même pas exister, le contage de mon propre livre. Je passe une troisième couche, jaune fluo, écœurante,