Quelque chose noire, roubaud

695 mots 3 pages
Roubaud : Orphée dans l’enfer moderne « Il est convenu que la tonalité sera sinistre […] Il y a ainsi des engendrements de sentiments disponibles dont je ne sais pas me servir. » Dans Quelque chose noir, Jacques Roubaud entend récuser les artifices du lyrisme topique de la jeune morte. Il ne s’agit plus pour la poésie d’adoucir l’expression d’un chagrin de toute façon inexprimable. C’est une descente aux enfers que raconte Roubaud, nouvel Orphée amené à vivre la mort de son Eurydice : Alix. Il éprouve le sentiment de dépossession de son propre univers. Et celui-ci se traduit par la monotonie absolue d’un quotidien décoloré par l’absence d’Alix : « Je remplis mon bol au robinet d’eau chaude de l’évier ». C’est une froideur qui se perçoit, celle-là même qui dit en filigrane l’usure de la souffrance et donne au recueil son caractère poignant. Reste une poésie dénudée, travaillée par la vision traumatique du corps mort en même temps que par les réminiscences d’un érotisme accablant. Le phrasé surgit comme l’image pornographique, soudaine, choquante : « Seins. Puis bas. La main s’approche, pénètre. » De fait, l’écriture détruit à mesure ses propres traces : il n’y a rien à espérer, rien non plus à exprimer, et les mots, démonétisés, ne renvoient qu’à du vide. « Cherchée qui ? où ? es-tu ? » Et pour nier cette mort, reste à quitter la poésie pour s’adonner à un illusoire « roman-photo », s’abandonner dès lors à une fiction où le poète, lucide, constate et s’objective : « il y a quelqu’un, un homme. Il n’est pas nommé. Il y a sa jeune femme qui est morte». Roubaud présenterait alors, dans un roman réduit à sa quintessence poétique, un nouveau mode d’extériorisation de la souffrance venue du dedans. Il construit en effet une représentation, un nouvel artefact. Autre mode de représentation significatif, le portrait invite à fixer quelque chose de celle qui est absente. Davantage que la projection d’un souvenir, il est une piction, une sorte d’image figée. L’idée

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