Résumé du desert des tartares
Ce fut un matin de septembre que Giovanni Drogo, qui venait d'être promu officier, quitta la ville pour se rendre au fort Bastiani, sa première affectation.
C'était là le jour qu'il attendait depuis des années, le commencement de sa vraie vie. Maintenant il était officier, il allait avoir de l'argent, de jolies femmes le regarderaient peut-être, mais, au fond, il s'en rendit compte, ses plus belles années, sa première jeunesse, étaient probablement terminées. L'amertume de quitter pour la première fois la vieille maison où il avait connu l'espoir, les craintes que tout changement apporte avec lui, l'émotion de dire adieu à sa mère lui emplissaient l'âme, mais sur tout cela pesait une pensée tenace qu'il ne parvenait pas à définir, comme le vague pressentiment de choses irrévocables, presque comme s'il eût été sur le point d'entreprendre un voyage sans retour.
Drogo se mit en route et, à mesure que l'après-midi s'écoulait, il commençait à ressentir une légère inquiétude. Et cependant il continua de monter pour arriver au fort dans la journée mais, plus lestes que lui, du fond de la gorge où grondait le torrent, montèrent les ombres.
Plus tard, a une distance incalculable Giovanni aperçut finalement, encore noyé dans le rouge soleil du couchant et comme issu d'un enchantement un plateau dénudé, sur les rebords de celui-ci une ligne régulière et géométrique, d'une couleur jaunâtre particulière : le profil du fort.
Drogo, fasciné, le regardait, se demandant ce qu'il pouvait bien y avoir de désirable dans cette bâtisse solitaire, presque inaccessible, à tel point isolée du monde. Quel secrets cachait-elle ?
Giovanni Drogo cheminait encore lorsque la nuit le surprit. A l'aube il se remit en route et chemin faisant, il avait été rejoint par le capitaine Ortiz qui regagnait le fort. Celui-ci lui avait raconté que le fort n'était qu'une vieille bâtisse démodée, un fort de deuxième catégorie, à la lisière d'une frontière morte, de l'autre côté de