Chez Marivaux et Beaumarchais, la lettre a une fonction apparemment dramatique puisqu’elle est censée faire avancer l’action : pousser Dorante à une révélation – qui n’en est pourtant pas une ni pour Araminte ni pour le spectateur- ou confondre Rosine. Mais dans les deux cas, l’objet manque ce but. Il faut toutefois percevoir sa particularité ici : dans chacun de ces extraits la lettre constitue un artifice utilisé par un personnage qui se transforme en metteur en scène et spectateur. La présence des apartés dans les deux extraits est significative ; chez Rosine on perçoit ainsi le décalage entre son trouble apparent que marquent les didascalies, le registre tragique dont elle use, -elle se désigne à la troisième personne, se dit « infortunée » et mourante- et l’aparté final qui traduit son évidente satisfaction. En réalité on voit bien qu’elle dramatise afin de laisser croire à Bartholo qu’il va intercepter la lettre du comte et qu’elle se croit prise au piège. En réalité, elle est spectatrice, le « regarde finement » et le dupe puisque « C’est la lettre de son cousin ». Bartholo, prend le change et passe ainsi de la colère à la sollicitude. Tout comme Rosine, Araminte organise ici une scène de théâtre à laquelle elle assiste en spectatrice ainsi que le souligne la mise en scène de Didier Bezace des Fausses confidences : Anouk Grinberg y observe Robert Plagnol, troublé, et absorbé dans l’écriture du billet. Il s’agit pour elle de mettre l’amoureux à l’épreuve en le forçant à avouer ses sentiments. Elle joue ainsi sur un phénomène de triple énonciation : le « votre mariage est sûr » est moins une information destinée au comte qu’un message adressé à Dorante et un indice de l’artifice pour le spectateur. Les apartés d’Araminte montrent qu’elle observe : au « il ne sait ce qu’il fait » succède « il souffre mais ne dit mot » comme des didascalies internes. Les impératifs : Le trouble que perçoit Araminte confirme les confidences faites par Dubois et pour le